Le problème du stress au travail est de plus en plus d’actualité. « C’est le nouveau mal du siècle en milieu professionnel ». A l'heure où le travail se fait rare, on se rend compte que beaucoup de salariés se plaignent de la souffrance au travail. La souffrance psychique que le travail génère quelquefois à de multiples facettes : dépressions, suicides, mais aussi maladies du corps - troubles musculo-squelettiques, crises cardiaques, cancers, ou d'accident du travail .
Le stress n’est plus seulement un problème personnel mais devient celui de l'entreprise. Selon l’agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, le stress professionnel survient «lorsqu’il y a un déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et ses propres ressources pour y faire face» et c’est la vague de suicide à France télécom qui a été l’élément déclencheur de la prise de conscience générale du stress au travail. Ce phénomène affecte tout le monde : ouvrier, cadre, patron du secteur privé ou public.
Quels sont ses facteurs de stress ? Est ce qu’on peut alléger ce phénomène aujourd’hui ? Le travail est–il encore la valeur centrale de la société ? Est-ce le travail lui-même, son organisation, la méthode de management utilisée par certaines entreprises qui privilégie plus l’individualisme au détriment du collectif, le manque d’autonomie des salariés, la précarité, le devoir de performance, la surcharge de travail avec des objectifs inatteignables, la mobilité encouragée par l’entreprise, le temps passé dans les transports et leur inconfort des trajets depuis et vers le domicile des salariés… ? Autant de phénomènes qui peuvent expliquer la dégradation de la santé mentale de l’homme au travail. Il est important de lutter contre l'isolement, de renforcer la cohésion collective par le dialogue et la reconnaissance du salarié. Le thème du stress professionnel fait les beaux jours des sites Internet, des livres et surtout des cabinets qui se spécialisent dans ce domaine avec des relaxateurs, des coachs.
Les moyens de prévenir le stress au travail existent. Les mesures utilisées pour la prévenir, éliminer ou réduire le stress au travail peuvent être diversifiées, collectives et/ou individuelles. Seule la démarche de prévention collective est à privilégier car elle s’inscrit sur du long terme. On doit prendre en compte le collectif et non l’individu. Si la prévention des risques psychosociaux est essentielle pour assurer le bien-être des salariés, elle est aussi un enjeu pour l'efficacité économique des entreprises. Pour réduire les sources de stress, il faut agir sur l'organisation, les conditions de travail , les relations sociales de travail et/ou le poste de travail. Certains motivent leurs équipes en améliorant le lieu de travail : des locaux somptueux, des activités de détente (musculation ou yoga), des siestes aménagées (avec l'exemple de l’Autriche), des horaires flexibles en fonction du poste, fournir des informations aux salariés sur la sécurité et la santé au milieu du travail…. C’est chez eux que le niveau de stress reste très bas. Les salariés produisent plus et plus rapidement et ont moins d'accidents graves qu’auparavant.
En France, Xavier Bertrand a lancé une enquête nationale pour mesurer le stress au travail et identifier les secteurs touchés. Le ministère a donc mis en ligne, jeudi 18 février, sur le site consacré à "la santé et la sécurité au travail" Travailler-mieux.gouv.fr
Les mesures de prévention contre le harcèlement et la violence au travail, arrêtées dans un accord du 26 mars 2010 entre tous les syndicats et le patronat. Elle s'impose à tous : les employeurs comme les salariés. C'est l'Europe qui a obligé à la France à négocier sur ce point . Les mesures sont censées permettre d'"améliorer la sensibilisation et la compréhension (des employeurs, des salariés et de leurs représentants)" afin de "mieux prévenir le harcèlement et la violence au travail", "les réduire et si possible les éliminer". Tout est écrit désormais dans un guide des bonnes pratiques qui s'applique à toutes entreprises. Comme il vaut mieux prévenir que guérir, les salariés et l'encadrement hiérarchique pourront bénéficier d'une formation spécialisée afin d'être mieux sensibiliser.
Une plus grande vigilance est demandée à l'employeur à l'égard de certains indicateurs, comme des conflits de personne répétés, des plaintes fréquentes de salariés, ou des passages à l'acte violents. L'employeur doit prendre en considération "l'ensemble des éléments de l'environnement de travail : comportements individuels, mode de management, relations avec la clientèle, mode de fonctionnement de l'entreprise". Il devra faire plus attention aux personnes les plus vulnérables au harcèlement comme les seniors ou les salariés handicapés et les femmes, etc. ...
Dorénavant, les personnes qui s'estiment victimes de harcèlement au travail ou / mais aussi celles mises en cause peuvent engager une procédure de médiation. Le médiateur soumettra des propositions écrites en vue de mettre fin au harcèlement et leur expliquera les sanctions encourues et les garanties pour la victime. Si le cas est avéré, cette dernière peut bénéficier d'un accompagnement médical, psychologique voire juridique. Mais dans l'hypothèse où la procédure n'aboutirait pas, les salariés victimes peuvent à aller au prud'homme.
Il faut rappeler que l’employeur est tenu à la fois d’assurer la sécurité et de protéger la santé de son personnel dans l’accomplissement du travail. Cette obligation trouve son fondement dans les dispositions de l’article L.230-2 du code du travail, telles qu’elles résultent de la loi du 21 décembre 1991, transposant la directive n°89 /391/ CE, du 12 juin 1989. Il revient à l’employeur d’évaluer les risques, y compris psychosociaux, et de prendre les mesures nécessaires pour assurer et protéger la santé physique et mentale ainsi que la sécurité de ses salariés. Cette obligation générale repose sur une approche globale de la prévention des risques professionnels. La loi n°2002-73 du 17 janvier 2002 impose à l’employeur de préserver ses salariés. Il incombe à l’employeur d’assurer la santé physique et mentale des salariés (article L. 230-2 du Code du travail).
Au-delà de ces dispositions générales, la prévention du stress au travail pourra également s'appuyer sur des réglementations particulières visant la prévention de certains risques susceptibles de constituer des sources de stress. C'est notamment le cas de la prévention des risques dus au bruit ou au travail sur écran, de dispositions réglementaires relatives à certains modes d'organisation du travail (travail de nuit, travail en équipe de suppléance et travail posté) et aux relations de travail (principe de non-discriminations, non-discrimination syndicale, interdiction du harcèlement moral et obligation de le prévenir). La responsabilité pénale de l’employeur pourra être engagée sur la base du Code du travail ou du Code pénal. Sa responsabilité civile pourra être recherchée en cas faute intentionnelle ou de faute inexcusable. En dehors des dispositions générales et des réglementations particulières, il existe un accord cadre européen sur le stress au travail, signé par les partenaires sociaux le 8 octobre 2004. Cet accord attire l'attention sur les risques liés au stress et sur les mesures susceptibles d'être mises en œuvre pour prévenir ces risques. L'accord national interprofessionnel du 2 juillet 2008 sur le stress au travail a transposé cet accord qui s'impose désormais à tous les employeurs. Ceci renforce les obligations de prévention du stress au travail des entreprises. Ces dernières ont l’obligation de faire le diagnostic des risques psychosociaux (elles ne peuvent se soustraire aujourd’hui de cette obligation).
La loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale introduit la notion de harcèlement moral dans le code du travail, et sa répression dans le code pénal. La loi impose à l’employeur de préserver la santé physique et mentale de ses salariés. Elle prévoit que le contrat de travail est exécuté de bonne foi et doit donc prévenir ou faire cesser des actes de harcèlement moral. A défaut, sa responsabilité peut être engagée. " Le harcèlement moral est devenu en France un délit pénal".
Notons qu'aucun abus d'autorité n'est exigé par la loi pour constituer l'infraction. Le harcèlement moral, comme le harcèlement sexuel, peut donc être le fait d'un collègue ou d'un subordonné. Mais, contrairement au harcèlement sexuel, le harcèlement moral nécessite des agissements répétés.
Il y a harcèlement sexuel lorsqu’une personne fait subir à un salarié ou à un candidat à l’embauche des contraintes ou pressions en vue d’obtenir des faveurs de nature sexuelle. Les victimes ou témoins de tels actes bénéficient d’une protection.
Il y a maintenant des textes sanctionnant spécifiquement le harcèlement moral au travail. Il peut prendre des formes diverses (refus de communication, menaces, "mise au placard", conditions de travail dégradantes ou humiliantes).
Art. L. 122-49. - Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
" Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi, ou refusé de subir, les agissements définis à l'alinéa précédent ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. "
" Toute rupture du contrat de travail qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit ».
La loi de 1992, qui avait introduit le harcèlement sexuel dans le code du travail et dans le code pénal, visait tout particulièrement le dirigeant ou l'employeur. En effet, l'infraction était constituée par un acte de harcèlement afin d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, mais il fallait que l'auteur ait abusé de l'autorité conférée par ses fonctions, ce qui supposait un rapport hiérarchique. La loi du 17 janvier 2002 élargit l'incrimination puisque, désormais, le rapport d'autorité hiérarchique n'est plus nécessaire. Les agissements de harcèlement sexuel légalement répréhensibles peuvent être le fait de toute personne dans l’entreprise, collègues, subordonnés… De même, la lutte contre le harcèlement sexuel s’étend dorénavant aux candidats en poste et aux stagiaires.
La loi n°2003-6 du 3/01/03 aménage la charge de la preuve : le salarié concerné ne présente plus des éléments de fait mais doit les « établir ». Il appartient à l’employeur de prouver que les agissements ne constituent pas du harcèlement sexuel et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. La nouveauté, c’est que la loi prévoit l'institution d'un médiateur en matière de harcèlement.
Les incivilités, les agressions physiques ou verbales, les violences
L’accord cadre européen du 26 avril 2007 sur le harcèlement et la violence au travail définit les différentes formes de violence au travail. Il peut s’agir de violences physiques sur les biens et/ou les personnes (agressions provenant d’un client, d’un patient, d’un usager, vols…), de violences concernant des salariés «entre eux» ou plus psychologiques (domination, intimidation, persécution, humiliation…).
Les documents obligatoirement tenus par l'employeur
Quels que soient la taille de l’entreprise et son secteur d’activité, l’employeur doit tenir certains documents :
- Le règlement intérieur de l’entreprise obligatoire au-dessus de 20 salariés, qui précise, entre autres, les mesures d’applications de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité de l’entreprise ;
- Le bilan social de l’entreprise, institué pour le entreprises d’au moins 300 salariés et qui apporte au comité d’entreprise les informations utiles en ce domaine.
La réparation du préjudice
La réparation du préjudice
C’est la Sécurité Sociale, par sa branche « accident du travail » financée uniquement par des cotisations patronales, qui organise également la réparation pour les salariés.
Pour les fonctionnaires, c’est leur administration, ou leur employeur public, qui assure directement cette réparation.
Elle consiste en des remboursements de soins, le versement d’une rémunération en cas d’arrêt de travail, de rente ou de capital en cas de séquelles importantes.
Il existe un tableau des maladies professionnelles, et un système complémentaire pour les maladies à caractère professionnel (qui peuvent être hors tableau ou ne pas répondre à tous les critères du tableau).
Dans tous les cas, il est nécessaire de rompre l’isolement, de ne pas rester seul. Les victimes du stress doivent se manifester. Tous n'obtiendront pas gain cause. Mais toutes les affaires donneront des éléments pour construire une maladie à caractère professionnelle. Des procès sont en cours. La reconnaissance avance puisque la mort d'un salarié à france télécom a été qualifié "d'accident de service".
L’intervention d’un tiers est parfois nécessaire : solliciter l’intervention de la DRH ou du délégué du personnel (dispose d'une procédure d'alerte en cas d'atteinte aux droits des salariés et aux libertés individuelles), l’inspection du travail, médecin du travail (veille à l'application des dispositifs du code du travail) ou le comité d’entreprise peut jouer les intermédiaires en prévention ou protection du travail, des associations peuvent aussi vous épauler. Enfin, vous avez la possibilité de saisir la justice.
Avez-vous déjà été stressé au travail ? Comment gérez-vous votre stress ? N’hésiter pas à nous faire part de votre témoignage.
Les sources :
http://www.passeportsante.net/fr/Actualites/Dossiers/DossierComplexe.aspx?doc=travail_stress_do
www.lemonde.fr/.../stress-au-travail-le-classement-des-entreprises_1307795_3224.html http://www.lefigaro.fr/entreprise/2010/05/11/05011-20100511ARTFIG00515-un-deuxieme-plan-pour-la-sante-au-travail.php
http://www.reponseatout.com/harcelement-moral-a-9115,48.html
http://www.npa2009.org/content/souffrance-au-travail-france-telecom-un-modele
http://www.silicon.fr/fr/news/2010/05/25/france_telecom__la_crise_des_suicides_n_est_pas_terminee
http://www.youtube.com/watch?v=xvlEhnVshXo
http://www.netpme.fr/travail-entreprise/174-principales-innovations-loi-modernisation-sociale.html
http://www.infotravail.com/droit-du-travail/harcelement-au-travail,72.html
http://www.nature-ergonomie.fr/magazine/spip.php?article61
http://www.latribune.fr/actualites/economie/france/20100208trib000472892/decouvrez-l-enquete-inquietante-sur-le-stress-des-trajets-domicile-travail.html article de Diane Lacaze
http://www.avht.org/page.php?idpage=4&sup=98%20&PHPSESSID=18d5b45222f833ba6141d87c8c65daee
http://www.netpme.fr/dossiers-drh/798-harcelement-moral-comment-se-premunir.html*
http://droit-finances.commentcamarche.net/faq/1566-contrat-de-travail-securite-des-salaries
http://www.travailler-mieux.gouv.fr/Notions-de-base.html
http://www.observatoiredustressft.org/
Magazine « entreprise et franchise » juin /juillet 2010 article d’Alice Belmont p21
la Newsletter de juritravail publiée le : 2010-05